Rétention des étrangers : précisions relatives à la computation des délais

Rétention des étrangers. En cas de situation irrégulière sur le territoire français, un étranger peut être retenu dans l’attente de son éloignement. Cette privation de liberté, qui peut être prolongée à plusieurs reprises, est encadrée par les textes et notamment les articles L.551-1 et L.552-7 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA).

Il résulte de ces textes qu’à l’expiration du délai initial de 48 heures, la rétention d’un étranger peut être prolongée, sous certaines conditions, d’un délai de vingt-huit jours puis, le cas échéant, d’un nouveau délai de quinze jours.

Ainsi, les textes visent des délais en heure et d’autres en jours. Ce qui n’est pas sans poser des difficultés en pratique et c’est sur ce point que la chambre criminelle de la Cour de cassation s’est très récemment prononcée. (Cass. Crim. du 22 janvier 2020, 19-84.160)

La Cour résume ainsi les faits et la procédure :  » le 13 juillet 2018 , le préfet du Puy de Dôme a rendu un arrêté à l’encontre de M. X… le contraignant à quitter sans délai le territoire français et a fixé à trois ans à compter de la notification de la décision, l’interdiction de retour sur le territoire national, que cet arrêté a été notifié à l’intéressé le même jour à 14h15 ; qu’à la même heure, M. X… a été placé en rétention administrative, prolongée ultérieurement jusqu’au 27 août 2018 ; qu’à cette dernière date, et à 15h15, M. X… a refusé d’embarquer dans l’avion qui devait procéder à son éloignement« 

La décision attaquée était un arrêt de la Cour d’appel de Lyon rendu le 19 juin 2019 qui retenait le raisonnement suivant : « les mesures de rétention concernant des étrangers se décomptent d’heure à heure, que, compte tenu du début de la mesure initiale de rétention à 14h15 le 13 juillet 2018, cette mesure expirait irrévocablement le 27 août à 14h15, et qu’en raison d’un retard dû à l’organisation des transports, ce n’est qu’à 15h15, le 27 août, que M. X… a été amené à la passerelle d’embarquement à un moment où la mesure coercitive de rétention n’était plus effective ; qu’en conséquence, la mesure de rétention ayant pris fin une heure auparavant, il n’existait plus à 15h15 de cadre légal légitimant une mesure de coercition pour la reconduite à la frontière »

Selon les conseillers de la Cour d’appel de Lyon, l’étranger ne pouvait être retenu dès lors que la décision de prolongation avait cessé de produire ces effets à 14h15 puisque la première mesure avait été rendue à cette heure par le préfet.

La Cour de cassation ne retient pas le même raisonnement et affirme : « que le dernier délai dont il était fait application était exprimé en jours, la chambre de l’instruction a violé les textes susvisés ;« 

Ainsi, à l’expiration du délai initial de 48 heures, le délai de rétention, dès lors qu’il est exprimé en jours, expire le dernier jour à vingt-quatre heures et non à l’heure de la première de la mesure initiale.


Sources

Articles L 551-1 et L 624-1-1 du CESEDA

Articles 641 et 642 du code de procédure civile

Article 591 du code de procédure pénale